La course...et l'abandon

3 heures trente du matin. Il fait froid à Cilaos. Trop froid. J'arrive tôt car j'apprends que l'entrée au stade est à partir de 4 heures. Au moins je suis sur place. Je patiente avec mon sweet et mon pantacourt que je garde sur moi, alors que des trailers réunionnais sont déjà prêts, cuissard et t-shirt prêts à partir. Nous entrons dans le stade et déjà le public s'installe dans les gradins pour nous supporter...
Une demi heure avant le départ. Il est temps de m'échauffer et de me badigeonner les muscles. Et d'un seul coup la majorité des trailers se retrouve contre un portail, celui du départ. Je les rejoins et me retrouve au 2/3 du peloton. Dommage car j'aurai souhaité être plus devant. Tant pis pour moi. Le départ est donné après 6 heures 15 du matin et les hélicoptères, les cris de joie du public nous portent sur la route du Bloc. Je double, et redouble pour rester dans le timing et finalement je me retrouve en avance sur mon temps d'entrainement au pied du Piton des Neiges. A partir de là, un par un nous effectuons la montée vers le sommet. Une traileuse est assise sur un rocher et pleure. Elle n'en peut plus.
 A la moitié de la montée une 1ere crampe me vient au mollet, trés forte, m'obligeant à m'arrêer. Des dizaines de trailers me doublent. Je prend un sporténine et je repart en buvant beaucoup d'eau pour faire passer. 2ème crampe un peu plus haut ou je m'arrête de nouveau. Et le même scénario. Je prend des noix de cajou ainsi qu'un sporténine avant de boire au camelback.
C'est alors que loin de la montée je m'aperçois que j'ai bu toute mon eau. Ouf! comment gérer jusqu'en haut sans eau. Je tête la dernière goutte et je demande à un trailer une gorgée pour pouvoir continuer. Je continue l'ascension. Dur, dur mais je tiens jusqu'au gite. J'ai perdu beaucoup de forces, je grignote un morceau de barre énergétique qui me tire au coeur. A tel point qu'une médecin bénévole me conseille d'arrêter et de retirer le bracelet. Non... je continue vers la descente de Hell Bourg où la boue nous empêche de tenir un rythme pour être dans les délais. Je téléphone à ma chérie qui m'attend à Hell Bourg, et après une interminable descente j'arrive au stade avec une heure d'avance.
Je m'arrête à peine à Hell-Bourg, et après coup je pense avoir fait une erreur de ne pas être allé au ravitaillement.
Mon épouse me masse et je repart vers Ilet à Vidot. Et mes maux de ventre réapparaissent. Avec un poignard sur l'estomac je coure, je marche...pendant huit kilomètres. Je sais que je ne peux plus manger de barres. Je n'ai plus rien sauf l'eau de mon camelback. et je sais que je ne tiendrai pas longtemps sans glucose. Je sens mon corps s'épuiser sans sucre et après une montée difficile je réalise que je ne pourrai aller jusqu'au prochain ravitaillement.
C'est alors que je prend la décision d'arrêter. La seule décision que je ne voulais pas prendre. Je m'assois sur un rocher et j'appelle mon épouse au téléphone. C'est dur, très dur, mais je suis en même temps heureux d'avoir pu seulement me présenter au départ avec mes deux blessures. Je retourne en arrière et j'encourage les trailers qui étaient derrière moi.
Tout est fini pour mon Trail de Bourbon 2011... Mon épouse vient au devant de moi et m'accompagne jusqu'à la voiture. Elle me dit "Qu'est ce que tu es blanc, tu as bien fait d'arrêter!" Nous repartons vers Saint Denis et tout en récupérant avec un sandwich au jambon je n'ai qu'une seule idée en tête: revenir à Cilaos pour terminer cette course, et passer la ligne d'arrivée de la Redoute.        

J - 4 : le parcours du Trail de Bourbon

Cilaos. Je pense me lever à 3 heures pour me rendre au pointage à partir de 4 heures. Le départ va être donné à partir du stade et tout de suite nous allons courir sur le bitume quelques centaines de mètres avant "d'attaquer" le plateau des Chênes et la Roche Merveilleuse. La montée n'est pas trop difficile (+ 250m de dénivelé) mais il va falloir gérer au niveau cardiaque et ne pas s'emballer dés le départ... surtout ne pas partir trop vite. De la Roche Merveilleuse nous allons descendre par la route, attention aux articulations, afin de rejoindre le début du Piton des Neiges. La montée est raide et longue (+ 2484m) avec en prime le brouillard ou la pluie et la descente très technique (que je n'ai pu repérée) permettra de rejoindre le stade de Hell Bourg.
Changement de cirque à partir de Hell Bourg où nous allons parcourir 5 kms de route avant d'attaquer Grand Sable en direction du col de Fourche. De là nous alternerons montées et descentes en traversant plusieurs fois les rivières (huit je crois) dans un paysage magnifique. Arrivés au Sentier Scout nous plongerons sur Aurère avec des échelles et une longue descente sur des pinnes de pins (bien bloquer le bassin pour éviter la chute et les entorses). Aurère, la moitié de l'ultratrail, et c'est la descente sur la Porte et la rivière des Galets jusqu'à Deux Bras. C'est à Deux Bras que la Diagonale des Fous et le Trail de Bourbon se rejoindront pour terminer ensemble cette extraordinaire aventure. Après avoir traversé la rivière à Deux Bras sans tomber avec le sac à dos (n'est-ce pas Michèle) le mur de Dos d'Ane nous attend (+ 635m de dénivelé sur 4 kms) à chacun son rythme, et sa peine. Ensuite nous entamerons la descente sur la Possession ou je rejoindrai mon épouse au stade après 72 kms d'efforts. Une halte supplémentaire sera profitable avec massages et nous pourrons continuer sur le chemin des Anglais, un sentier pavé comme ceux de la course de vélo Paris/Roubaix, où le mieux est de courir en imaginant une ligne au centre. Cette étape sera surement la plus pénible pour les articulations, et il faudra tenir au moral. A la fin du chemin des Anglais nous traverserons St Bernard avec 4 kilomètres de route interminable. La dernière montée sera celle vers la Fenêtre avant d'attaquer la ligne de crête du Colorado (repérable à sa boule blanche). Enfin nous descendrons le dernier sentier ou l'on entend les bruits de la ville avec cette impression de ne jamais arriver. Il restera un ultime effort après le passage du pont pour enfin arriver au Stade de la Redoute. Sublime accueil des Réunionnais pour le franchissement de la ligne et seulement à ce moment là nous pourrons dire "Nous avons survécu" (devise de l'association Grand Raid).
Bon courage à tous.

24 septembre 2011

Nous sommes le 24 septembre 2011, à trois semaines seulement de la course au départ de Cilaos. Que d'efforts et de blessures, que de motivation pour être au départ du Trail de Bourbon 2011. Encore une fois nous avons revus le sac à dos et l'organisation de la course. Tout est prêt. Je suis prêt, et je n'attends que le Départ. 
En ce moment ma préparation se résume une fois par semaine à une course d'une heure le long du littoral, une sortie VTT de deux à trois heures et une séances de gainage .  
93 kms et mon plus grand souhait serait de rejoindre le stade de la Redoute à Saint Denis de la Réunion.

La préparation et les blessures

A un an du Trail de Bourbon 2011 il a fallu augmenter les charges de travail.
A raison de quatre séances par semaine (endurance, VMA, seuil, côtes et sorties) et de préparation spécifique les autres jours (renforcement musculaire, gainage, PPG) mon programme de la semaine se résumait ainsi:

- lundi : endurance le long de la mer (de 30 ' à 1h30)
- mardi : travail à la maison (chaise, escaliers, renforcement des quadriceps)
- mercredi : soit VMA (accélération sur 30''), soit séance au Seuil (accélération sur 10') avec échauffement et retour au calme, tous les 15 jours
- jeudi : 3/4 d'heures au parc de la Trinité avec côtes et descentes (de 5 à 10)
- vendredi : séance de gainage  (3/4 d'heures)
- samedi : repos (chaise, escalier, renforcement quadriceps)
- dimanche : soit sortie en montagne (avec reconnaissance de toutes les étapes), soit montée au Brûlé (5,5 kms de montée avec un dénivelé de + 750m et une déclivité de 13,5%)



Un bon programme, et malheureusement avec des blessures.  
- 1 élongation à l'ishio jambier droit après un entrainement d'endurance
- 2 tendinites répétitives au genou droit dues à des chaussures, semelles inadaptées et surentrainement
- et aujourd'hui un syndrome fuméro patellaire aux 2 genoux, autrement dit une inflammation des cartilages de la rotule, suivi d'une 2ème élongation derrière la cuisse droite. Après une cinquantaine de séances de kinésithérapie, homéopathie, ostéopathie et "visites" chez les médecins du sport, les podologues, avec des étirements tous les jours je reprends peu à peu la course à pied.



 

Que la montagne est belle !

De là ma 1ère pensée, mon 1er objectif, mon Rêve... a été de participer à LA DIAGONALE DES FOUS. Comme de partir sur Mars, de plonger au fond des océans, de découvrir un autre moi, ma seule obstination a été de me préparer. Nos randonnées nous ont d'abord permis de découvrir La Réunion et ses cirques, sa nature et ses gens... n'est ce pas Alina ?
Chez Alina (Aurère)
Gite de Marla (après le passage du col du Taïbit)
Avec ma chérie



Mon épouse et moi-même nous sommes lancés sur les sentiers tout d'abord en marchant, et ensuite en courant, en courant encore, et encore et toujours.


D'ailleurs le comique était quelque fois au rendez-vous.


Enivré par les sites et ses paysages généreux je me suis tout de suite senti profondément en osmose avec cette liberté de courir, et de me sentir un homme près de la nature.

     

Déjà deux ans ...

Tout à commencer le jour où nous avons mon épouse et moi-même assisté à l'arrivée de la Diagonale des Fous au mois d'octobre 2009.
Julien Chorier arrivait au stade de la Redoute après 22 heures 9 minutes d'effort et plus d'une centaine de kilomètres dans les jambes. Ouf ! Quel exploit, quelle aventure il avait vécu. Nous sommes restés ce soir là très tard pour accueillir les premiers traileurs de la course la plus mythique et la plus difficile au monde: LA DIAGONALE DES FOUS.